C'est la question que j'ai posée à des membres de ma famille au cours d'une discussion plutôt animée. La question était directe et limpide. La réponse l'était moins. Tout d'abord, il est apparu que leur aversion pour les homosexuels est presque viscérale. Pourtant, aucun de mes interlocuteurs n'a un jour discuté avec un homo de son homosexualité. Pour eux, celle-ci peut par exemple se transmettre par un phénomène de mode, et l'on peut devenir homo sur un coup de tête. Ils y croient dur comme fer. Il m'a été impossible de les faire ne serait-ce qu'envisager qu'elle est quelque chose de sous-jacent chez les personnes concernées, et qu'elle fait surface plus ou moins tard dans leur existence. L'un d'eux a même déclaré avec conviction qu'il valait mieux qu'aucun "pédé" ne s'approche de lui, comme si les homos ne faisaient connaissance avec des personnes du même sexe que dans le but d'en faire leur petit(e)s ami(e)s. Et même lorsque je lui ai demandé s'il tapait aussi sur les filles qui le draguaient alors que lui n'était pas intéressé, il a répondu "c'est pas pareil". Pourquoi êtes vous homophobes ? "Parce que..." ont-ils rétorqué, ignorant probablement eux-mêmes leurs raisons. Alors leur ai-je demandé comment réagiraient-ils si leurs enfants étaient homosexuels. "Ça me ferait chier pour eux" a-t-on répondu. Et pourquoi ? "Parce que Parce qu'ils auraient du mal à s'intégrer parmi les autres, parce qu'ils seraient repoussés." Ainsi n'aiment-ils pas les homosexuels parce qu'ils craignent que leurs enfants, s'ils l'étaient, soient mal-aimés. L'évidente contradiction résidant dans cet argument n'a pas réussi à les faire démordre de leur opinion. Ils sont homophobes, mais n'en connaissent pas les raisons.

Je n'ai toujours pas compris pourquoi. Il me semble pourtant que, si deux individus responsables consentants, quel que soit leur sexe, ressentent de l'amour l'un pour l'autre, personne n'est en droit d'empêcher cet amour. Il est déjà difficile pour les hétérosexuels de le trouver. Que dire alors des homos, souvent rejetés, assumant parfois mal leur être, et ayant moins de facilités que les hétéros pour faire des rencontres ? L'homosexualité a toujours existé et existera toujours. Comment est-il possible qu'elle n'ait pas été acceptée après tant de temps ? Cette peur est sans nul doute due, avant tout, à la peur de l'inconnu. Un sentiment ancré en nous aussi profondément que le reste de nos instincts animaux. Au même titre que l'instinct de perpétuation de l'espèce. Les homosexuels ont peu de chances d'assurer une descendance ; la crainte de la fin de la lignée attiserait-elle, de manière inconsciente, l'homophobie chez les parents, potentiels ou non ?

L'espoir de l'acceptation de l'homosexualité ne réside pas seulement dans notre génération et celles à venir ; une rencontre dans le RER m'a agréablement aidé à en prendre conscience : une grand-mère expliquait à sa petite-fille de 9 ans qu'il ne fallait pas employer le mot "pédé" et que les homosexuels étaient à la fois "comme nous" et différents, et qu'ils avaient droit à cette différence. N'ayons pas peur de l'homosexualité, elle n'est pas une maladie. L'homophobie en est-elle une ?

Armen.

Il serait utile de préciser à ce sujet qu'il existe une association "homophile" à l'ENS (Ulm) ouverte à toutes et à tous et visant avant tout la discussion, l'intégration et la lutte contre les préjugés homophobes. Les personnes intéressées pour assister aux réunions et participer aux activités peuvent contacter les responsables sur le site : http://homonormalité.free.fr

Guillaume V.